Dossier : Quelle est la place de l'immobilier dans la campagne présidentielle ?
Notons d'abord que la partie logement du programme d'Emmanuel Macron est sous-titrée "Concentrer les moyens là où ils sont vraiment nécessaires." Une phrase qui n'est pas sans rappeler les programmes de Marine Le Pen et de François Fillon.
On relèvera ensuite la longueur du texte. Ce n'est pas une nouveauté, l'ex-ministre de l'économie peine à être concis. Reste à voir si tous ces détails sont convaincants.
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Comme à son habitude, Emmanuel Macron suis un plan bien établi. Il pose son diagnostic avant de dérouler ses propositions.
Élément intéressant, il commence par rappeler l'objectif de 500 000 constructions par an que nous entendons depuis plusieurs années et qui, selon certaines estimations, permettrait de résoudre la crise du logement en France. Un objectif que nous ne nous donnons pas les moyens d'atteindre selon lui.
“Nous nous fixons depuis trop longtemps de grands objectifs (« 500 000 constructions par an ») sans nous donner les moyens de les atteindre. Nous devons donc créer un choc d’offre, afin de "tasser les prix" là où les besoins sont les plus grands.”
Emmanuel Macron, Programme, 2017
Finalement le candidat d'En Marche termine son introduction en identifiant trois grands paradoxes concernant le logement en France :
“D’abord, notre parc de logements a été construit pour les familles d’hier, qui divorçaient moins et qui déménageaient moins : aujourd’hui, les familles se recomposent et nous sommes dans une société de la mobilité.”
Emmanuel Macron, Programme, 2017
“Ensuite, nous savons qu’il faudrait construire beaucoup plus de logements, mais cela est trop compliqué à cause des normes trop nombreuses, d’un droit de l’urbanisme trop complexe et de procédures trop longues.”
Emmanuel Macron, Programme, 2017
“Enfin, nous dépensons chaque année 40 milliards d’euros dans la politique du logement, sans permettre à tous d’accéder à des logements de qualité. Ainsi, on compte encore 4 millions de mal-logés dans notre pays.”
Emmanuel Macron, Programme, 2017
Une manière de dénoncer l'inefficacité des politiques du logement précédentes et tous les fonds publics qu'elles ont engloutis.
Pour faire face à la pénurie de logements que connaît la France, les spécialistes sont unanimes, il faut construire. C'est pourquoi nous regardons de près les annonces des différents candidats sur cette question.
Comme nous venons de le voir, et à l'instar de Marine Le Pen et de François Fillon, Emmanuel Macron estime que les procédures en vigueur dans le bâtiment freinent la construction de nouveaux logements. Il estime donc qu'il faut, a minima, ne pas en rajouter.
“Le secteur du logement, qui nécessite par définition des investissements sur le long terme, a besoin pour se développer de confiance et de stabilité. Un marché qui se développe est un marché stable.”
Emmanuel Macron, Programme, 2017
Il pense également que pour libérer le marché du bâtiment et lui permettre de tourner à plein régime, il est nécessaire de mettre en place des procédures accélérées pour faciliter la construction. Notons que Macron souhaite réserver ces procédures particulières aux zones tendues où le logement est “trop cher.”
Plus concrètement, il s'agit par exemple de transférer la compétence de la délivrance des autorisations d'urbanisme comme le permis de construire, aux intercommunalités, aux métropoles voire à l'État. Mais ces procédures accélérées impliquent aussi la limitation des possibilités de recours. Car Monsieur Macron souhaite un État beaucoup plus interventionniste, notamment sur ces questions de logement.
"Nous mettrons en place des procédures accélérées dans les zones où le logement coûte trop cher. Cela permettra de construire plus vite des logements et de faire baisser les prix de l’immobilier."
Emmanuel Macron, Programme, 2017
Emmanuel Macron se tourne aussi vers la jeunesse en annonçant la construction de 80 000 logements pour les jeunes :
En ce qui concerne le logement social, Macron déclare vouloir réformer le système d'attribution qu'il juge trop opaque aujourd'hui. Contrairement à Marine Le Pen et à François Fillon qui sont restés assez flous sur cette question, le leader d'En Marche avance une solution plus claire. Il souhaite remplacer le système existant pas un mécanisme à points reposant sur différents critères.
“Au lieu de procédures parfois opaques, nous mettrons en place un système de points, fondé sur des critères objectifs (taille de la famille, niveau des ressources, lieu de recherche). Il permettra à chacun de connaître ses chances d’obtention d’un logement et le délai d’attente prévisible.”
Emmanuel Macron, Programme, 2017
Nous le soulignions un peu plus tôt, le candidat d'En Marche souhaite séduire la jeunesse. Pour ce faire il propose la création de 30 000 “logements jeunes” au sein du parc social. Ces logements seront accessibles :
De plus, comme Benoit Hamon mais contrairement à François Fillon, Emmanuel Macron se prononce pour la loi SRU “qui a accéléré l’accroissement de la construction de logements sociaux depuis 16 ans.” A priori il ne devrait pas y avoir de changement en ce qui concerne la part de logements sociaux que doit faire construire chaque commune. Rappelons qu'elle était de 20% avant la promulgation de la loi Alur depuis laquelle elle est passée à 25%.
L'ex-ministre s'engage ensuite en faveur de l'intermédiation locative qu'il définit comme la “gestion ou [la] location d’un logement du parc privé par une association pour y loger des ménages à faibles ressources”, et dont il entend augmenter la part dans le parc social. Concrètement, il s'agirait pour les bailleurs sociaux d'acheter environ 40 000 logements supplémentaires dans le parc privé pour porter le nombre de place disponible en intermédiation locative de 25 000 à 65 000.
Le problème a pris une ampleur nationale depuis la très médiatique affaire Laforêt fin 2016 et l'étude menée par le CNRS quelques mois plus tard. Pourtant Emmanuel Macron est le seul favori à s'emparer du sujet.
Selon lui, pour lutter efficacement contre les discriminations, il faut développer les contrôles. Une mesure qu'il entend appliquer aussi aux discriminations en matière d'accès à l'emploi.
“Nous développerons des opérations de contrôle aléatoires et imprévues à grande échelle, en matière d’accès à l’emploi ou au logement. Les partenaires sociaux seront également mobilisés.”
Emmanuel Macron, Programme, 2017
Comme Nicolas Sarkozy il y a 10 ans avec son droit au logement opposable, Emmanuel Macron souhaite assurer à chacun un vrai "droit à la domiciliation." Il compte assurer ce nouveau service public en faisant évoluer les missions de La Poste.
“A destination des sans-abris, nous assurerons un droit à la domiciliation (qui permet de déclencher d’autres droits, notamment l’accès aux minima sociaux ou la candidature aux logements HLM et d’assurer le suivi de leur courrier) en faisant évoluer la mission de service public de La Poste.”
Emmanuel Macron, Programme, 2017
Emmanuel Macron fait une priorité de la rénovation urbaine et notamment celle des quartiers prioritaires. Ses objectifs sont d'offrir un meilleur cadre de vie aux populations vivant dans ces quartiers, notamment via "l'humanisation du bâti" et la réintroduction de services publics et de proximité dans ces quartiers.
Il fait deux propositions dans ce but :
C'est dans cette section que se cache l'une des mesures phares d'Emmanuel Macron. En effet, le candidat d'En Marche a annoncé qu'il souhaite exonérer une grande part des Français de la taxe d'habitation. Quatre Français sur cinq très exactement ! Monsieur Macron assure cependant que cette baisse d'impôt n'impactera pas le budget des collectivités territoriales. En réalité, l'État se substituera à certains ménages et paiera 10 milliards d'euros chaque année pour financer le manque à gagner.
On relèvera une mesure intéressante dans ce domaine, la création d'un bail "mobilité professionnelle" répondant aux besoins des actifs en mobilité temporaire, lesquels sont de plus en plus nombreux avec l'uberisation du marché du travail.
“Il s'agira d'un bail d'une durée de 3 mois à un an, destiné aux actifs en mobilité professionnelle et soumis aux mêmes protections réglementaires que le bail étudiant. Ce bail sans dépôt de garantie sera déployé dans certaines zones tendues où les logements sont aujourd'hui trop souvent détournés du marché locatif à des fins touristiques. Nous permettrons ainsi aux actifs en mobilité qui ont besoin d'un logement sur une courte durée d'accéder à une offre adaptée et disponible.”
Emmanuel Macron, Programme, 2017
Sur cette thématique, ni Marine Le Pen ni François Fillon n'ont pris d'engagement chiffré. La rénovation énergétique des bâtiments est évoquée par les deux candidats de la droite, mais cela reste flou.
Benoît Hamon s'est quant à lui engagé sur un plan quinquennal de 100 milliards d'euros pour la rénovation urbaine et thermique.
Emmanuel Macron donne lui aussi un chiffre et promet la rénovation d'un million de logements mal isolés sur le quinquennat, en donnant la propriété aux ménages les plus modestes. Pas d'indication supplémentaire quant au mode de sélection de ces habitations. Il est également question de supprimer les “passoires énergétiques” en 10 ans.
Concrètement, cela passera par plusieurs mesures :
De Marine Le Pen à Benoit Hamon en passant par François Fillon, on retrouve certaines similitudes entre le programme d'Emmanuel Macron et celui de ses adversaires. Contrairement à ce qu'on pouvait entendre il y a quelques semaines, le programme d'En Marche existe, il est même plutôt bien développé. Plus que celui de certains de ses adversaires en tout cas, eux qui lui reprochaient la vacuité de son projet pour la France.
Entre hyper-libéralisme et ambitions sociales, une question reste cependant. Le programme d'Emmanuel Macron peut-il vraiment résoudre cette crise du logement qui est loin d'aller en s'arrangeant malgré d'importantes dépenses de l'État ? Et plus largement, un tel programme à cheval entre libéralisme total et social-démocratie a-t-il vraiment une légitimité dans une campagne où les vieilles politiques sont battues en brèche ? Les électeurs répondront à cette question le 23 avril 2017…
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A.VEROT le 19/04/2017
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